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rent généralement accueillies par l’opinion publique que comme d’ingénieuses rêveries. D’ailleurs, les maîtres de cette école crurent devoir forger une langue technique pour exprimer avec précision des maximes qui étaient neuves, ce qui ouvrit à la critique une large voie pour jeter sur leurs leçons les traits du ridicule, arme bien plus meurtrière que tout le feu de la dispute.

Peu d’années après la publication de la doctrine économique, un homme doué du génie le plus vaste et le plus pénétrant, qui avait médité et approfondi les vérités découvertes par les économistes, conçut le projet d’en faire une application utile et sensible pour tout le monde, en les rattachant à l’intérêt national de son pays, et en leur donnant tout le développement dont elles sont susceptibles sous ce nouveau rapport.

Les économistes français avaient recherché l’origine et la marche de la formation des richesses parmi les hommes en général. Adam Smith s’attacha particulièrement à la recherche des causes du progrès des richesses parmi les nations. En paraissant ainsi circonscrire son sujet, il lui fit prendre une dimension beaucoup plus étendue. Il vit que les nations s’enrichissaient non-seulement par la multiplication des richesses produites sur leur propre sol, mais plus rapidement encore par les échanges les plus avantageux possible avec les autres nations. C’est ce que l’auteur annonce dès la première phrase de son livre, en disant que le travail annuel d’une nation est la source primitive d’où elle tire toutes ses richesses, et que ces richesses sont toujours ou le produit immédiat de son travail, ou achetées des autres nations avec ce travail.

Cette considération le porta à examiner la nature du travail, sa puissance et ses effets ; il rechercha les causes qui ajoutent à ses produits. Il montra dans le travail la mesure universelle et invariable des valeurs ; il fit voir que toute chose vénale avait son prix naturel, vers lequel elle gravitait sans cesse au milieu des fluctuations continuelles du prix courant, occasionnées par des circonstances accidentelles étrangères à la valeur intrinsèque de la chose. Ensuite, pour expliquer les causes de ces fluctuations passagères, il analysa avec une merveilleuse sagacité les éléments divers dont se compose le prix de toute chose échangeable, en indiquant les variations dont chacun de ces éléments était susceptible. Toutes ces importantes vérités, appuyées sur des exemples familiers, étaient d’une application facile et