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Ces philosophes observèrent :

1o Que toutes les richesses provenaient d’une source unique, qui était la terre, puisque c’était elle qui fournissait à tous les travailleurs leur subsistance et les matériaux ou produits bruts sur lesquels ils exerçaient leur industrie.

2o Que le travail appliqué à la culture de la terre produisait non-seulement de quoi s’alimenter lui-même pendant toute la durée de l’ouvrage, mais encore un surplus de produit après le remplacement de toute la dépense, surplus qui ajoute conséquemment à la masse des richesses déjà existantes, et qui formait un produit net nécessairement dévolu au propriétaire de la terre, et constituait entre ses mains un revenu pleinement disponible. Qu’au contraire, le travail appliqué aux productions détachées de la terre, ce qui comprend le travail des manufactures et du commerce, ne pouvait rien ajouter aux choses sur lesquelles il s’exerçait ; que la valeur additionnelle qu’elles recevaient de ce travail n’était que l’équivalent du salaire plus ou moins élevé des ouvriers ou de l’entrepreneur qui avait dirigé le travail, et par conséquent de ce que ces ouvriers ou ce directeur d’ouvrage avaient consommé ou avaient eu le droit de consommer pendant la durée de cet ouvrage, en sorte qu’après le travail achevé, la somme totale des richesses existantes dans la société était précisément la même qu’auparavant, à moins que les ouvriers ou le directeur de l’ouvrage n’aient mis en réserve une partie de ce qu’ils avaient le droit de consommer. Les économistes en tirèrent la conséquence que le travail appliqué à la terre était le seul travail productif de richesses, et que le travail des artisans, manufacturiers ou commerçants, tout utile, tout indispensable même qu’il était, devait néanmoins être considéré, relativement à l’autre, comme un travail stérile, puisqu’il ne servait nullement à accroître la somme des richesses, et que cette classe d’ouvriers, ne produisant aucune richesse nouvelle, ne pouvait concourir à l’augmentation de la masse des richesses que par ses privations et ses économies.

D’après ces principes, ils établirent que les propriétaires de la terre recueillaient, en première ligne, la totalité des richesses produites ; que les non-propriétaires ne pouvaient consommer que ce qu’ils recevaient directement ou indirectement des propriétaires ; que, par conséquent, les non-propriétaires, quelles que fussent l’utilité et l’éminence de leurs services, n’étaient que les salariés des propriétaires,