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Ce dernier système du moins n’était pas de nature à entraîner des conséquences aussi graves que les deux autres, et tout le dommage qu’il pouvait occasionner se bornait à une dépense inutile pour le trésor et à un renchérissement artificiel du blé, qui fit payer au peuple sa subsistance un peu plus cher qu’il ne devait la payer si la gratification n’était pas établie. L’exportation des grains, provoquée par cette mesure, fit naître dans les marchés intérieurs une rareté qui ne se fût pas fait sentir si les quantités exportées se fussent montrées dans ces marchés.

Quant au but que se propose ce système, d’encourager la culture et d’augmenter la masse totale de la production, rien n’est certainement plus illusoire. Toute terre qui, à la récolte, donnera, année commune, une plus grande quantité de grains que celle qui a été avancée pour la semer et pour entretenir les ouvriers de la culture, sera nécessairement exploitée avec profit, et elle ne restera pas inculte, sans qu’il soit besoin d’exciter le propriétaire ou le fermier par l’appât de gagner une prime en argent ; et toute terre qui, étant cultivée, ne rendra pas, année commune, plus que la quantité dépensée pour la semer et pour nourrir les ouvriers, ne pourra être exploitée qu’avec perte, tant pour le particulier qui la possède ou qui la cultive, que pour le pays dont elle fait partie ; et la gratification qui aurait l’effet de faire mettre en culture une terre aussi ingrate, ne ferait qu’ajouter une perte de plus à une entreprise déjà ruineuse par elle-même. La hausse du prix du blé en argent ne peut pas faire mettre en culture un pouce de terre de plus, quand cette hausse n’est pas l’effet d’un déficit réel. On ne produit du blé qu’avec du blé ; et si, par des moyens factices, vous parvenez à faire renchérir le prix du blé de la récolte, vous aurez fait également renchérir le prix du blé employé à la semence et à la nourriture des ouvriers de la culture. De quelque manière que l’on s’y prenne, ce sera toujours la qualité de la terre et son degré de fertilité qui décideront s’il peut y avoir profit ou non à la mettre en culture. « La nature, dit Smith, a imprimé au blé sa valeur. Il n’y a pas de monopole pour la vente au-dedans, pas de gratification pour l’exportation qui aient la puissance de hausser cette valeur, comme la concurrence la plus libre ne saurait la faire baisser. »

Enfin, ce système agricole a été totalement abandonné, et l’Angleterre, qui avait payé des gratifications pour l’exportation de ses