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quantité de travail ; et quoique, par suite de l’état florissant[1] de la société, le prix réel du travail doive s’élever considérablement, cependant la grande diminution dans la quantité du travail que chaque chose exige fait bien plus, en général, que compenser quelque hausse que ce soit dans le prix de ce travail.

Il y a, à la vérité, certains genres de manufactures dans lesquels la hausse nécessaire du prix réel des matières premières fait plus que compenser tous les avantages que les progrès de l’industrie peuvent introduire dans l’exécution de l’ouvrage. Dans les ouvrages de charpenterie et de menuiserie, et dans l’espèce la plus grossière de meubles en bois, la hausse nécessaire du prix réel du bois, résultant de l’amélioration de la terre, fera plus que compenser tous les avantages qu’on pourra retirer de la perfection des outils, de la plus grande dextérité de l’ouvrier, et de la division et de la distribution les plus convenables du travail.

Mais pour tous les ouvrages où le prix réel des matières premières ne hausse point ou ne hausse pas extrêmement, celui de la chose manufacturée baisse d’une manière considérable.

Cette diminution de prix a été la plus remarquable, durant le cours de ce siècle et du précédent, dans les manufactures qui emploient les métaux grossiers. On aurait peut-être aujourd’hui pour 20 schellings un meilleur mouvement de montre que celui qu’on aurait payé 20 livres vers le milieu du siècle dernier. Quoique moindre que dans l’horlogerie, il y a eu aussi une grande réduction de prix, pendant la même période, dans les ouvrages de coutellerie et de serrurerie, dans tous les petits ustensiles faits de métaux grossiers et dans toutes ces marchandises connues communément sous le nom de quincaillerie de Birmingham et de Sheffield. Elle a été assez forte pour étonner les ouvriers de tous les autres endroits de l’Europe, qui, à l’égard de beaucoup d’articles, conviennent qu’ils ne pourraient pas faire d’aussi bon ouvrage pour le double ou même le triple du prix. Il n’y a peut-être pas de manufactures où l’on puisse porter aussi loin la division du travail et où les instruments qu’on emploie soient susceptibles d’être perfectionnés d’autant de manières différentes, que les manufactures dont les métaux grossiers sont la matière première.

  1. Ce mot florissant est employé, dans tout le cours de cet ouvrage, dans le sens qu’il semble présenter le plus naturellement, quoique le plus communément usité ; il signifie ici un état de croissance et de développement.