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verte des mines de l’Amérique. Quelle que soit l’une ou l’autre de ces deux hypothèses qui eût lieu, elle serait de très-peu d’importance pour la richesse et la prospérité réelle du monde, pour la valeur réelle du produit annuel de la terre et du travail parmi les hommes. Sans doute, la valeur nominale de ce produit, la somme d’or ou d’argent par laquelle il serait exprimé ou représenté, serait très-différente dans les deux cas ; mais la valeur réelle du produit, la quantité réelle de travail qu’il pourrait commander ou acheter, serait toujours précisément la même. Il se pourrait, dans l’un de ces cas, qu’un schelling ne représentât pas plus de travail qu’un penny n’en représente aujourd’hui et que, dans l’autre, un penny en représentât autant que fait à présent un schelling. Mais, dans le premier cas, celui qui aurait un schelling dans sa poche ne serait pas plus riche que celui qui a aujourd’hui un penny ; et dans le second cas, celui qui aurait alors un penny serait tout aussi riche que celui qui a un schelling à présent. Le seul avantage que le monde pourrait retirer de l’une de ces hypothèses, et le seul inconvénient qui résulterait pour lui de l’autre, ce serait, dans la première, l’abondance et le bon marché de la vaisselle et des bijoux d’or et d’argent et, dans la seconde, la rareté et la cherté de ces frivoles superfluités.


conclusion de la digression sur les variations dans la valeur de l’argent.


La plupart des écrivains qui ont recueilli les prix en argent des denrées, dans les temps anciens, paraissent avoir regardé le bas prix, en argent, du blé et des marchandises en général, ou, en d’autres termes, la haute valeur de l’or ou de l’argent, comme une preuve non-seulement de la rareté de ces métaux, mais encore de la pauvreté et de la barbarie du pays à cette époque. Cette notion se lie à ce système d’économie politique qui fait consister la richesse nationale dans l’abondance de l’or et de l’argent, et la pauvreté générale dans leur rareté, système que je tâcherai d’expliquer et d’examiner fort au long dans le quatrième livre de ces Recherches. Je me contenterai d’observer, pour le moment, que la grande valeur des métaux précieux ne peut pas être la preuve de la pauvreté et de la barbarie d’un pays à l’époque où a lieu cette grande valeur. C’est seulement une preuve de la stérilité des mines qui se trouvent à cette époque approvisionner le monde commerçant. Comme un pays pauvre n’est pas en état d’acheter plus d’or et d’argent qu’un pays riche, par la même raison il n’est pas en état de les payer plus cher ; ainsi il n’est pas vraisemblable que ces métaux aient plus de