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terre améliorée et cultivée. Sans cela, ceux-ci cesseront bientôt d’en nourrir. Ainsi, toute partie de ce prix qui ne se trouve pas payée par la laine et la peau, il faut que le corps la paye. Moins on paye pour l’un de ces articles, plus il faut payer pour l’autre. Pourvu que le propriétaire et le fermier trouvent tout leur prix, il leur importe peu comment il sera réparti sur les différentes parties de la bête. Ainsi, comme propriétaires et comme fermiers, dans tout pays cultivé et amélioré, ils ne peuvent guère être lésés par de tels règlements, quoiqu’ils puissent en souffrir comme consommateurs, par la hausse du prix des vivres. Cependant il en serait tout autrement dans un pays sans amélioration et sans culture, où la majeure partie des terres ne pourrait être employée qu’à nourrir des bestiaux, et où la laine et la peau feraient la plus grande partie de la valeur de l’animal. Dans ce cas leur intérêt, comme propriétaires et comme fermiers, souffrirait extrêmement de semblables règlements, et leur intérêt, comme consommateurs, en souffrirait très-peu. Dans ce cas, la baisse du prix de la laine et de la peau ne ferait pas monter le prix du corps de la bête, parce que, la majeure partie des terres du pays ne pouvant servir qu’à nourrir du bétail, on en nourrirait toujours tout autant. Il viendrait toujours au marché la même quantité de viande de boucherie. La demande n’en serait pas plus forte qu’auparavant ; ainsi son prix resterait le même. Le prix total de l’animal baisserait et, avec lui, tant la rente que le profit de toutes ces terres dont le bétail faisait le produit principal, c’est-à-dire de la majeure partie des terres du pays. Dans de telles circonstances, la prohibition perpétuelle d’exporter la laine, qu’on attribue communément, mais à tort, à Édouard III, eût été le règlement le plus destructif qu’on eût pu jamais imaginer. Non-seulement il aurait diminué la valeur alors actuelle de la majeure partie des terres, mais encore, en abaissant le prix de l’espèce de menu bétail la plus importante, il aurait prodigieusement retardé l’amélioration ultérieure du royaume.

Le prix des laines d’Écosse baissa considérablement par suite de l’union avec l’Angleterre, par laquelle elles furent exclues du grand marché de l’Europe, et confinées dans les bornes étroites du marché de la Grande-Bretagne. Cet événement aurait extrêmement influé sur la valeur de la majeure partie des terres des comtés méridionaux d’Écosse, qui sont principalement des pays de moutons, si la baisse du prix de la laine n’eût été largement compensée par la hausse de celui de la viande de boucherie.