Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/380

Cette page a été validée par deux contributeurs.

marché, mais encore les méthodes perfectionnées le mettent à même de trouver son compte en vendant à meilleur marché ; car, s’il ne l’y trouvait pas, l’abondance ne pourrait durer longtemps. C’est vraisemblablement ainsi que l’introduction des luzernes, des turneps, des choux, des carottes, etc., a contribué à faire baisser le prix ordinaire de la viande de boucherie au marché de Londres, un peu au-dessous de ce qu’elle était vers le commencement du siècle dernier[1].

Le cochon, qui trouve à se nourrir dans l’ordure, et qui dévore avidement mille choses que rebutent les autres animaux utiles, est un animal qu’on a, dans l’origine, comme la volaille, pour faire profit de tout. Tant que le nombre de ceux qu’on peut nourrir ainsi pour rien, ou presque rien, suffit complètement à remplir la demande, cette sorte de viande vient au marché à beaucoup plus bas prix qu’aucune autre. Mais quand la demande excède ce que cette quantité-là peut fournir, quand il devient nécessaire de faire croître de la nourriture exprès pour nourrir et engraisser des porcs, comme on fait pour d’autre bétail, alors le prix de cette viande hausse nécessairement, et devient en proportion ou plus élevé ou plus bas que le prix de l’autre viande de boucherie, suivant que, par la nature du pays ou l’état de sa culture, il se trouvera que les cochons coûteront ou plus ou moins à nourrir que d’autre bétail. Selon M. de Buffon, le prix du porc, en France, est à peu près le même que celui du bœuf. Dans la plupart des endroits de la Grande-Bretagne, il est à présent un peu plus élevé.

On a souvent attribué la hausse considérable du prix des cochons et de la volaille en Angleterre à la diminution du nombre des cottagers et autres petits tenanciers ; diminution qui, dans tous les endroits de l’Europe, a été le prélude immédiat de l’amélioration et de la meilleure culture, mais qui, en même temps, peut bien avoir contribué à élever le prix de ces deux articles un peu plus tôt et un peu plus rapidement qu’il n’aurait fait sans cela. De même que le ménage le plus pauvre peut souvent nourrir un chat et un chien sans aucune dépense ; de même les plus pauvres tenanciers pouvaient ordinairement nourrir presque pour rien quelque peu de volaille ou une truie avec quelques petits. Les restes de leur table, leur petit-lait, le lait écrémé et le lait

  1. Il est très-difficile d’établir la quotité des prix à cette époque d’une manière exacte, faute de bases régulières : on ne peut calculer que par approximation.
    Buchanan.