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De longs apprentissages ne sont nullement nécessaires. Un art bien supérieur aux métiers ordinaires, celui de faire des montres et des pendules, ne renferme pas de secrets qui exigent un long cours d’instruction. À la vérité, la première invention de ces belles machines, et même celle de quelques instruments qu’on emploie pour les faire, doit être le fruit de beaucoup de temps et d’une méditation profonde, et elle peut passer avec raison pour un des plus heureux efforts de l’industrie humaine. Mais les uns et les autres étant une fois inventés et parfaitement connus, expliquer à un jeune homme, le plus complètement possible, la manière d’appliquer ces instruments et de construire ces machines, cela doit être au plus l’affaire de quelques semaines de leçons, peut-être même serait-ce assez de quelques jours. Dans les arts mécaniques ordinaires, quelques jours pourraient certainement suffire. À la vérité, la dextérité de la main, même dans les métiers les plus simples, ne peut s’acquérir qu’à l’aide de beaucoup de pratique et d’expérience. Mais un jeune homme travaillerait avec bien plus de zèle et d’attention, si dès le commencement il le faisait comme ouvrier, en recevant une paye proportionnée au peu d’ouvrage qu’il exécuterait, et en payant à son tour les matières qu’il pourrait gâter par maladresse ou défaut d’habitude. Par ce moyen son éducation serait, en général, plus efficace, et toujours moins longue et moins coûteuse. Le maître, il est vrai, pourrait perdre à ce compte ; il y perdrait tous les salaires de l’apprenti, qu’il épargne à présent pendant sept ans de suite ; peut-être bien aussi que l’apprenti lui-même pourrait y perdre. Dans un métier appris aussi aisément, il aurait plus de concurrents, et quand l’apprenti serait devenu ouvrier parfait, ses salaires seraient beaucoup moindres qu’ils ne sont aujourd’hui. La même augmentation de concurrence abaisserait les profits des maîtres, tout comme les salaires des ouvriers. Les gens de métier et artisans de toute sorte, ceux qui exploitent des procédés secrets, perdraient sous ce rapport, mais le public y gagnerait, car tous les produits de la main-d’œuvre arriveraient alors au marché à beaucoup meilleur compte.