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toute espèce de commerce qu’il présume pouvoir donner quelque profit extraordinaire, et il l’abandonne quand il prévoit que les profits en pourront retomber au niveau de ceux des autres affaires : ses profits et ses pertes ne peuvent donc garder aucune proportion régulière avec ceux de toute autre branche de commerce fixe et bien connue. Un homme qui ne craint pas de s’aventurer peut quelquefois faire une fortune considérable en deux ou trois spéculations heureuses ; mais il est tout aussi probable qu’il en perdra autant par deux ou trois spéculations malheureuses. Un tel commerce ne peut s’entreprendre que dans les grandes villes. Ce n’est que dans les endroits où les affaires et les correspondances sont extrêmement étendues, qu’on peut se procurer toutes les connaissances qu’il exige.

Les cinq circonstances qui viennent d’être exposées en détail occasionnent bien des inégalités très-fortes dans les salaires et les profits, mais elles n’en occasionnent aucune dans la somme totale des avantages et désavantages réels ou imaginaires de chacun des différents emplois du travail ou des capitaux ; elles sont de nature seulement à compenser, dans certains emplois, la modicité du gain pécuniaire, et à en balancer la supériorité dans d’autres[1].

Cependant, pour que cette égalité ait lieu dans la somme totale des avantages et désavantages des emplois, trois choses sont nécessaires, en supposant même la plus entière liberté : la première, que l’emploi soit bien connu et établi depuis longtemps dans la localité ; la seconde, qu’il soit dans son état ordinaire, ou ce qu’on peut appeler son état naturel, et la troisième, qu’il soit la seule ou la principale occupation de ceux qui l’exercent.

Premièrement, cette égalité ne peut avoir lieu que dans ces emplois qui sont bien connus et qui existent depuis longtemps dans la localité.

Toutes choses égales d’ailleurs, une entreprise nouvelle donne de plus hauts salaires que les anciennes. Quand un homme forme le projet d’établir une manufacture nouvelle, il faut, dans le commencement, qu’il attire les ouvriers et les détourne des autres emplois par l’attrait de salaires plus forts que ceux qu’ils gagneraient dans leurs propres professions, supérieurs à ceux que mériterait le nouveau travail, et il

  1. Cette conclusion de l’auteur nous semble bien obscure et bien hasardeuse. Les choses ne se passent pas ainsi dans la réalité. A. B.