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utile que l’eau, mais elle ne peut presque rien acheter ; à peine y a-t-il moyen de rien avoir en échange. Un diamant, au contraire, n’a presque aucune valeur[1] quant à l’usage, mais on trouvera fréquemment à l’échanger contre une très-grande quantité d’autres marchandises.

Pour éclaircir les principes qui déterminent la valeur échangeable des marchandises, je tâcherai d’établir :

Premièrement, quelle est la véritable mesure de cette valeur échangeable, ou en quoi consiste le prix réel des marchandises.

Secondement, quelles sont les différentes parties intégrantes qui composent ce prix réel.

Troisièmement enfin, quelles sont les différentes circonstances qui tantôt élèvent quelqu’une ou la totalité de ces différentes parties du prix au-dessus de leur taux naturel ou ordinaire, et tantôt les abaissent au-dessous de ce taux, ou bien quelles sont les causes qui empêchent que le prix de marché[2], c’est-à-dire le prix actuel des marchan-

  1. Le mot valeur a souvent été employé pour désigner, non seulement le prix d’échange d’un article, ou sa faculté d’être échangé pour d’autres objets que le travail seul peut donner, mais encore son utilité, ou la propriété qu’il possède de satisfaire à nos besoins ou de contribuer à notre bien-être et à nos jouissances. Mais il est évident que l’utilité des marchandises est une qualité tout à fait différente de leur faculté d’échange : témoin le pouvoir qu’a le blé d’apaiser notre faim, et l’eau d’étancher notre soif. Le Dr. Smith a découvert cette différence, et il a démontré l’importance qui s’attachait à distinguer l’utilité des marchandises ou, comme il le disait, leur valeur d’usage ou naturelle, de leur valeur d’échange. Confondre des qualités si essentiellement distinctes, serait évidemment entrer dans la voie des plus absurdes conclusions. Aussi, pour éviter de méconnaître le sens d’un mot aussi important que celui de valeur, il serait mieux de ne l’appliquer qu’à la valeur d’échange, et de réserver le mot utilité pour exprimer le pouvoir ou la faculté que possède un article de satisfaire à nos besoins ou de répondre à nos désirs.
    Mac Culloch.
  2. L’usage veut que l’on appelle valeur échangeable la quantité de toute marchandise que l’on donne en échange de celle qu’on veut avoir, et prix la quantité de monnaie que l’on donne pour le même objet. J.-B. Say.