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loin de causer la richesse, causerait la misère universelle[1].

Dès qu'il y a surabondance de produits, le travail superflu doit être consacré à des objets de luxe. La consommation des objets de première nécessité est limitée, celle des objets de luxe est sans limites. On aura bientôt produit tous les habits, tous les souliers, tout le blé, toute la viande que consommeront les artisans, dans la condition à laquelle ils sont aujourd'hui réduits. Lors même que, par une organisation plus équitable de la société, on réussirait à leur réserver une plus grande part dans les richesses qu'ils créent, on aurait encore bientôt pourvu aux jouissances qui peuvent s'accorder avec le travail. On n'arrivera pas sans doute à les envoyer à leur atelier en carrosse, ou à les faire travailler à leurs métiers en habits de velours ou de brocart d'or : si tel devait être le résultat de ce zèle pour produire.

  1. Je fais, dans ce raisonnement, abstraction du commerce extérieur. Si on veut le prendre en considération, une nation pourra en effet être la pourvoyeuse de ses voisines ; mais le raisonnement se retrouvera vrai pour le genre humain, ou pour toute cette partie du genre humain qui commerce ensemble, et qui ne forme plus aujourd'hui, en quelque sorte, qu'un seul marché.