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ditions, en partageant les rôles, n'a point changé le but du travail humain. L'homme ne se fatigue que pour se reposer ensuite ; il n'accumule que pour dépenser ; il n'ambitionne les richesses que pour jouir. Les efforts sont aujourd'hui séparés de leur récompense : ce n’est pas le même homme qui travaille et qui se repose ensuite ; mais c'est parce que l'un travaille que l'autre doit se reposer.

Ensuite, les besoins de l'homme qui naît sont nécessairement fort bornés. D'après la multiplication prodigieuse des pouvoirs productifs du travail, on aurait bientôt pourvu, avec les forces de toute la société, à sa nourriture, à son logement, à son vêtement. Si la nation entière travaillait comme font les seuls manouvriers ; si par conséquent elle produisait dix fois plus de nourriture, de logement, de vêtement que chacun d'eux n'en peut consommer, se figure-t-on que la part de chacun en serait meilleure ? Bien au contraire. Chaque ouvrier aurait à vendre comme dix et à acheter seulement comme un : chaque ouvrier vendrait d'autant plus mal, et se trouverait d'autant moins en état d'acheter ; et la transformation de la nation en une grande manufacture d'ouvriers productifs constamment occupés,