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et où on les réduisait à ne connaître que leurs propres intérêts, en leur faisant juger ceux des autres. C’était aussi un système adopté par tous les ministres des gouvernemens absolus, lorsqu’ils se donnaient la peine de réfléchir sur les finances ; et Colbert n’y a eu d’autre part que celle de l’avoir suivi sans le réformer.

Après avoir long-temps traité le commerce avec un orgueilleux mépris, les gouvernemens avaient enfin reconnu en lui une des sources les plus abondantes des richesses nationales. Toutes les grandes fortunes de leurs états n’appartenaient pas aux négocians ; mais quand les rois éprouvaient des besoins subits, quand ils voulaient lever à la fois des sommes considérables, les négocians seuls les pouvaient servir. Les propriétaires de terre avaient souvent d’immenses revenus, les chefs de manufactures faisaient exécuter d’immenses travaux ; mais les uns et les autres ne pouvaient disposer que de leurs rentes, que de leurs produits annuels ; les négocians seuls offraient au besoin la totalité de leur fortune au gouvernement. Comme leur capital était représenté tout entier par des denrées déjà prêtes pour la consommation, par des marchandises destinées à l’usage immédiat du marché où ils les avaient transportées, ils pouvaient les vendre d’une heure à l’autre, et