Page:Sismondi - Nouveaux Principes d’économie politique.djvu/269

Cette page n’a pas encore été corrigée

tous les domestiques de le servir. Ils lui font crédit sans difficulté de leurs fournitures, de leur salaire, de leurs gages, et ils le laissent s'en gager dans un long désordre, avant de lui refuser leur confiance. Tout le public sait le montant de son revenu ; tout le public fait le compte du débiteur, et demeure convaincu que, par deux, par quatre, par six ans d'une sévère économie, il peut acquitter toutes ses dettes. Chacun se figure qu'il sera payé lorsque cette économie commencera ; et, en attendant, chacun contribue par de nouvelles confiances à en retarder l'époque. Le marchand met le prix qu'il veut aux marchandises qu'il passe en compte ; l'artisan, le valet, se paient par leurs mains sur les provisions de la maison. Ils jouissent de la prodigalité du maître et de son désordre ; la consommation augmente et les produits du travail diminuent, sans que le maître ose se plaindre de gens qu'il ne paie pas, et qui auraient plus encore droit de se plaindre de lui.

Qui ne sait que dans toute l'Europe c'est là le sort des grandes familles, qu'on les voit rarement parcourir jusqu'à trois générations sans tomber entre les mains d'un dissipateur ? Celui-ci lutte, pendant la plus grande partie de sa vie, avec les difficultés dans lesquelles il s'est engagé ; il ruse avec ses créanciers pour obtenir