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gourmandise. Il faut que le peuple ait ses plaisirs, et ce n'est pas la faute du journalier, si l'organisation sociale le réduit à ne connaître que les plus grossiers.

D'ailleurs, quand le journalier réussirait à mettre ensemble un petit capital, la suppression de tous les degrés intermédiaires dans la société l'empêche d'en profiter. Il y a trop loin de son sort à celui d'un gros fermier, pour qu'il puisse franchir cet espace ; tandis que, dans le système de la petite culture, le journalier peut avec ses petites économies prendre une petite métairie, de celle-ci passer à une plus grande, ou à une propriété. Les mêmes causes ont fait supprimer les intermédiaires dans les autres carrières ; un abîme se présente entre le journalier et toute entreprise de manufacture ou de commerce, aussi bien que de fermage ; et la classe inférieure a perdu l'espérance qui la soutenait, dans la précédente période de la civilisation. Les secours même de leur paroisse, qui sont assurés aux journaliers anglais, augmentent leur dépendance ; dans l'état de souffrance et d'inquiétude auquel ils sont réduits, ils peuvent à peine conserver le sentiment de la dignité humaine, ou l'amour de la liberté ; et au plus haut terme de la civilisation moderne, l'agriculture se rapproche