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une grande supériorité du travail de l'homme libre sur celui de l'esclave, même à égalité de vigueur. Columelle, qui écrivait vers l'an 40 de notre ère, conseillait aux propriétaires d'employer des esclaves toutes les fois qu'ils pouvaient les diriger eux-mêmes ; mais de s'en tenir aux cultivateurs libres, aux colons, si leurs possessions étaient éloignées, et s'ils ne voulaient pas vivre dans les champs, à la tête de leurs ouvriers [1].

L'étude des sciences, et l'habitude de l'observation, firent faire, il est vrai, des progrès à la théorie de l'agriculture ; mais en même temps, sa pratique déclinait rapidement, et tous les agronomes de l'antiquité s'en plaignent [2]. Le travail des terres fut absolument dépouillé de cette intelligence, de cette affection, de ce zèle qui avaient hâté ses succès. Les revenus furent moindres, les dépenses plus considérables, et dès lors on chercha à épargner sur la main-d'œuvre plutôt qu'à augmenter ses produits. Les esclaves, après avoir chassé des campagnes tous les cultivateurs libres, diminuèrent eux-mêmes rapidement en nombre. Pendant la décadence de l'Empire romain, la

  1. De Re rustica, lib. 1, cap. VII.
  2. Columella, de Re rustica, lib. 1, in Proemio.