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— Pardieu ! — ajouta Andronic du ton le plus convaincu. — C’est clair comme de l’eau de roche, et, pour ma part, je remercie Satanas d’avoir eu cette précaution.

Puis, sans donner à Ambroise le temps de réfléchir davantage, il s’écria :

— Ah ça ! attaquons-nous, mon cher hôte ?

— Mais, Monsieur Marcel, est-ce qu’on peut ?… demanda l’aubergiste indécis.

— Parbleu ! répliqua Marcel, en se servant du civet et en y goûtant. — Voyez, je vous donne l’exemple, moi, et je vous garantis que ce levreau n’a rien d’infernal. Goûtez, Messieurs, goûtez vous-mêmes.

— Excellent, en effet ! C’est à s’en lécher les doigts jusqu’au coude, appuya Andronic, qui avait imité Marcel ainsi que Catherine.

— Exquis en vérité, approuva à son tour Ambroise, qui s’était enfin décidé à faire comme les autres.

— Quel dommage ! dit Andronic avec un ton de regret, que nous ayions déjà pris un à-compte !… C’est égal… l’appétit vient en mangeant.

Sur cette réflexion, tous les convives, voulant prouver sans doute que les proverbes ne sauraient jamais avoir tort, se mirent à faire honneur à la cuisine du diable avec autant d’entrain que s’ils n’avaient rien mangé depuis deux jours. Le pâté de foie gras fut aussi fêté que le lièvre, et, du poisson, il ne resta que les arêtes.

En même temps, les pichets allaient leur train et se vidaient.

— Au dindonneau maintenant, — dit enfin Ambroise tout à fait mis en bonne humeur par la bonté des mets et légèrement ému déjà par les fumées du vin qu’il avait bu. — Passez-moi le volatile, s’il vous plaît, que je voie s’il est de chair et d’os comme ceux que j’ai dans ma cour.