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— Vous croyez, Monsieur ? — demanda Catherine qui s’était enfin un peu remise, mais qui n’osait encore trop regarder en face l’étrange docteur que le hasard semblait lui imposer.

— J’en suis sûr. Madame, — répliqua Marcel en cherchant à la rassurer de l’œil et de la voix.

— Alors, — conclut Ambroise, pour qui cette scène demeurait lettre close, — puisque le docteur a prononcé, il ne te reste plus qu’à obéir.

— En effet, — dit Catherine, cessant toute résistance et paraissant prendre définitivement son parti. — En effet, mais, Messieurs —ajouta-t-elle, comme pour entrer immédiatement dans toute la réalité ce son rôle, — vous n’avez pas mis de serviettes.

Et, courant à son armoire, elle en retira quatre serviettes et les plaça sur les assiettes.

— Allons, Messieurs, — s’écria Ambroise dès que cela fut terminé, — à table maintenant. Monsieur le docteur à cette place-ci, Monsieur son ami à celle-là et Catherine en face de moi… Mon souper n’a rien de bien séduisant assurément, mais j’ai toujours ouï dire que le meilleur assaisonnement d’un repas c’était l’appétit, et, Dieu merci ! je crois que nous n’en manquons pas ni les uns ni les autres.

— C’est ça, appuya gaîment Andronic, à table !… et en avant les fourchettes !

Sur ce mot, chacun se mit à la besogne.

Pendant les premiers moments, les convives ne parurent occupés que de faire honneur à la collation. Ambroise notamment s’en acquittait avec conscience, mais il avait beau mettre les morceaux en double, son voisin de droite, Andronic, opérait avec une telle célérité que son hôte, enchanté de se voir aussi bien secondé, ne put s’empêcher d’en faire la remarque.

— Ma fi ! Monsieur, en vous voyant manger d’aussi bon appétit, je ne saurais vous dire combien je suis heureux d’avoir eu l’idée de vous appeler. Ç’aurait été un crime vraiment que de vous laisser jeûner davantage… Mais il ne s’agit pas seulement de manger, il faut boire aussi… À votre verre maintenant.

Jacques SINCÈRE.
(La suite au prochain numéro.)