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— Mange donc, Ambroise, et cesse de songer au voisin, je t’en prie, — insista de nouveau Catherine.

— Au fait, tu as raison. Il n’en vaut guère la peine. À chaque heure d’ailleurs suffit sa tâche… Mais à propos, femme, tu ne me demandes pas des nouvelles d’Angélique.

— Oh ! d’après ce que tu en as déjà dit, j’imagine bien qu’elle continue à se bien porter.

— Comme un charme, ma fi ! et comme elle est grandie… et formée ! — et belle… C’est une femme à présent… et pas piquée des vers, je t’assure… à la ville tout le monde la remarque… Comme ça nous pousse, des enfants, comme ça !…

— Ah ! oui — murmura en a parte Catherine en balançant la tête…

— Et comme ça donne du cœur à l’ouvrage en même temps !… continua Ambroise avec feu. — Depuis qu’elle est née j’ai trimé comme un nègre pour lui ramasser une bonne dot, et jamais, au grand jamais, je n’ai eu l’idée de m’arrêter. C’est si bon de travailler pour les siens !… Ah ! ah ! c’est qu’il faudra songer à la marier, maintenant que son éducation est terminée ; et ce sera pas un écorcheur de barbes qui l’épousera, je te le garantis… Il me faut un… un…

Et Ambroise hésita.

Cherchait-il, dans son esprit, quelle devait être la position du gendre auquel il comptait donner la préférence ou craignait-il d’exprimer tout haut tous les beaux rêves qu’il avait secrètement faits à ce sujet ?