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On peut considérer de deux points de vue différents l’action de Dieu sur le monde. Ou bien elle ne s’exerce que sur l’ensemble des lois imposées à la création, lois d’après lesquelles se produisent tour à tour la génération et l’anéantissement des êtres, la croissance et le dépérissement des plantes, la rotation des astres, et de cette façon Dieu est bien cette providence qui amène sur les hommes la vie et la mort, qui donne aux animaux leur nourriture, aux petits des oiseaux leur pâture, et fait régulièrement lever le soleil pour distribuer à la terre la lumière, la chaleur, la fécondité. Ou bien cette action est plus spéciale et plus particulière, et va jusqu’à observer les moindres événements qui arrivent en ce bas monde, jusqu’à les prévoir même, pour les prendre ensuite tels qu’ils ont eu lieu et les faire servir à la réalisation de la fin en vue de laquelle tout a été créé. Ici la Providence n’est autre chose que cette science inhérente à Dieu, par laquelle, en sa qualité d’Être parfait, il voit et prévoit tous les événements possibles qui ensuite et au fur et à mesure qu’ils se produisent, sont dirigés par lui vers l’accomplissement du but qu’il s’est éternellement proposé. C’est à dessein que nous confondons les mots science et prescience. Qui affirme l’une affirme l’autre. Il ne coûte pas plus à Dieu de voir dans l’avenir que de voir dans le présent. Seulement en face de cette prescience, la liberté humaine existe-t-elle encore ? Voilà le nœud. C’est sur ce point que les trois religions se divisent l’une admettant à côté de la prescience divine la liberté absolue de l’homme ; l’autre croyant à une prédestination individuelle ; la dernière professant complètement le fatalisme.

Avouons tout de suite que si le Judaïsme a répandu quelque lumière nouvelle sur la vérité d’un Dieu-Providence, ce n’a pu être que sous le rapport de notre deuxième manière de l’envisager, c’est-à-dire comme Providence particulière. Quant à Dieu