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retranchement de nos propres membres, c’est-à-dire, ce qui tient le plus vivement et le plus intimement à notre cœur ; c’est le renoncement à tout plaisir, c’est l’obligation de vivre dans le corps comme si l’on était sans corps, de quitter tout, de donner tout aux pauvres pour ne posséder que Dieu seul, de vivre de peu et presque de rien et d’attendre ce peu de la Providence divine. »

Que ce soit là, outre le dogme de la Trinité, la différence fondamentale entre le Christianisme et le Judaïsme, qui oserait y contredire après Bossuet ? Mais combien plus praticable, combien plus vrai est l’amour de Dieu prêché par Moise, et comme il laisse l’homme à la société tout en lui demandant une portion de son affection pour le Créateur de l’Univers !

Examinons maintenant l’opinion de Guizot :

« Le Christianisme, dit-il, a fait deux choses également grandes et nouvelles. Il a placé la simple qualité d’homme en dehors et au-dessus de toute circonstance accidentelle ou locale, en dehors et au-dessus de la nationalité comme de la condition sociale. Selon la foi chrétienne, l’étranger est un homme et possède les droits inhérents à la qualité d’homme aussi bien que le compatriote[1] ».

Ou nous nous trompons fort et nous ne savons plus lire la Bible, ou cela est du Judaïsme tout pur. Les textes, à cet égard, sont formels[2].

Guizot continue : « Le Christianisme considère tous les hommes, tous les peuples, comme liés entre eux par d’autres liens que par la force, par des liens indépendants de la diversité du territoire et des gouvernements. » Et pour corroborer cette pensée, il ajoute, page 242 : Chez les plus glorieuses

  1. L’Église et la Société chrétienne, p. 102.
  2. Exode, 12, 49 ; Lévitique, 24, 22 ; Deuteronome, 15, 29 et 29, 11.