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attachement au devoir et au bien, qui oserait prétendre en remontrer aux orateurs ou docteurs israélites ayant précédé Jésus ou vécu en même temps que lui ? Depuis Moïse jusqu’à Maleachi et aux docteurs juifs, et précisément parce que prophètes et docteurs s’étaient, à la suite les uns des autres, toujours inspirés du Pentateuque, œuvre de Dieu même, s’est-il jamais prononcé un discours ou écrit une ligne qui ne fût l’expression de la plus pure morale ? Jésus ne s’y était pas trompé. Il l’a reconnu formellement par cette solennelle déclaration « Celui donc qui aura violé l’un de ces plus petits commandements et qui aura ainsi enseigné les hommes, sera estimé le plus petit dans le royaume des cieux ; mais celui qui les aura observés et enseignés, celui-là sera estimé grand dans le royaume des cieux[1]. » La Loi comme contenant, selon l’expression même de Jésus, les commandements propres à faire entrer dans la vie[2], fut chère au fondateur du Christianisme. Ce n’est pas lui qui en aurait jamais provoqué l’abolition. Il tendait à y introduire des réformes comme celles, par exemple, portant sur le sabbath et la nourriture. C’est déjà beaucoup trop. Il y avait là une entreprise sacrilège ; mais il se serait bien gardé de condamner la Loi dans ses pratiques absolument. Il avait fallu la fougue d’un Paul, et une position aussi gravement compromise que l’était la sienne aux yeux des Palestiniens, dont il avait commencé par épouser l’indignation contre le réformateur de Nazareth, pour oser s’attaquer ouvertement au caractère sacré de la Loi dans toutes ses pratiques, et lui substituer la foi sans autre forme de procès. Mais encore Paul lui-même, certes le plus radical de tous les apôtres, qu’a-t-il prêché finalement aux Gentils, sinon la morale même des Saintes-Écritures ?

  1. Mathieu, chap. V, v. 19.
  2. Mathieu, chap. XIX, v. 17.