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L’ÉCRIN DISPARU

Il en était là de ses réflexions, quand on vint lui annoncer la visite de l’Aumônier, dont les conseils l’avaient tant de fois déjà, sauvé d’un mauvais pas. Retirés tous deux, dans la chambre No 8 que la famille Giraldi avait voulu prendre à son compte, avec tous les frais d’hôpital, le jeune homme exposa à son guide et ami, l’impasse nouvelle, où le jetait le secret dont la divulgation était parvenue aux oreilles de Madeleine.

— Mon bon ami, reprit l’Aumônier après l’avoir écouté longuement, je comprends que votre présence dans la famille Giraldi serait un trop lourd fardeau pour vous et une gêne, voilée sans doute, mais trop réelle, pour ces cœurs meurtris.

— Alors, alors… c’en est fait de mon avenir, de mon bonheur ici-bas !

— Avant de vous dire le dernier mot de ma pensée, je vous conseillerais d’exposer la situation à votre Maître.

— Inutile : je connais sa réponse ; je sais que sa maison, sa table, sa bourse sont à ma disposition ; mais ma réhabilitation est au prix de sa déchéance…

— Je vous ai promis toute ma pensée, continua le prêtre ; or, la voici ; « Après toutes les preuves de chrétienne générosité, dont vous avez donné de si admirables exemples, oserais-je vous dire que cette vie, que Dieu vient de vous rendre miraculusement, ne vous appartient plus pour ainsi dire, et que c’est à son service, qu’elle devrait être désormais consacrée… »

Le jeune homme sentit les larmes emplir ses yeux.

— Mon Père, je ne doute pas que vous soyez l’instrument de Dieu pour me suggérer une résolution, dont l’idée jointe au souvenir de ma pieuse mère, m’a préoccupé dès les premiers jours de ma convalescence.

— Je n’attendais rien moins de votre grand cœur, mon ami.

— Mais pensez-vous, monsieur l’Aumônier, qu’informée de mon passé, il y ait une seule communauté religieuse qui consente à m’ouvrir ses portes ?…

— Eussiez-vous été dix fois plus coupable que le Prodigue de l’Évangile, le divin Père de famille, aurait encore une robe blanche et un anneau, pour votre repentir. Peut-on trouver plus noble et plus parfaite réhabilitation que celle-là ?

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Au printemps suivant, un groupe de religieux, vêtus de bure, chacun armé d’un sarcloir, un grand chapeau de paille sur le front, nettoyaient en silence l’immense jardin de la Trappe de