Page:Simon - L'écrin disparu, 1927.djvu/61

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
60
L’ÉCRIN DISPARU

— Veuillez excuser ma franchise Monsieur, mais pour vous parler net, je vous dirai, que c’est sur le fait que vous ne pratiquez pas votre religion.

— J’avoue, Mademoiselle, que vous m’embarrassez… C’est une véritable discussion que vous amorcez là, et…

— Eh bien, je consens à discuter, Monsieur, si toutefois ce sujet n’est pas un de ceux qui vous déplaisent ?…

En ce moment, monsieur Giraldi, qui revenait, entendit les derniers mots.

— Que je ne vous dérange pas dans vos polémiques, ajouta-t-il souriant.

— Toutefois, je dois vous prévenir Hippolyte, que si vous discutez religion avec ma fille, vous êtes battu d’avance.

— Toi « Papa » dit Madeleine en levant un index menaçant, tu vas pour un quart d’heure me faire le plaisir de garder la neutralité. Comme tu es dans le même cas que monsieur Paillard, tu prendras fatalement pour lui. Mais, comme tu es mon gentil Papa, que j’aime beaucoup et que je respecte souverainement, il ne m’appartient pas de critiquer quoi que ce soit dans tes idées. Mais, il n’en est pas de même pour Hippolyte, qui m’a permis de lui faire la morale.

— Morale, dont je pourrais faire mon profit, dit Léo en souriant…

Après une demi-heure d’argumentation serrée de part et d’autre, poussé jusque dans ses derniers retranchements par la logicienne impitoyable :

— Vous ne me répondez pas Monsieur Paillard !…

— Ma foi non, avoua franchement le jeune homme, pour la bonne raison, que je ne vois pas grand’chose à répondre. Il y a sans doute des points faibles dans votre raisonnement, mais cela nous entraînerait trop loin. Je préfère vous donner raison, quant au fond, du moins.

— Je ne vous ai pas froissé, j’espère, Monsieur ?

Le regard de celui-ci se fit ému et sympathique :

— Je n’en avais plus le droit, Mademoiselle, vous ayant concédé l’autorisation de la polémique. D’ailleurs, votre foi sincère et votre franchise charmante, autorisaient toutes vos audaces.

— Tu peux avoir raison. Madeleine, dit Monsieur Giraldi, qui jusque-là, avait observé la neutralité convenue ; mais tu es jeune, mon enfant, tu ignores la vie. Avec le temps, tu apprendras à témoigner de l’indulgence pour le grand nombre de ceux