Page:Simon - L'écrin disparu, 1927.djvu/58

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
57
L’ÉCRIN DISPARU

avec lequel son mari avait reçu la nouvelle. Au lieu de l’opposition invincible qu’elle attendait, elle rencontra, sinon un consentement direct, du moins une indifférence respectueuse pour la volonté de son fils.

Au fond monsieur Giraldi ne croyant pas à la persévérante détermination de son aîné, comptait bien qu’un jour ou l’autre le jeune homme reviendrait de lui-même sur sa décision, sans avoir de griefs à formuler contre personne relativement au choix de sa carrière. Monsieur Giraldi ne connaissait encore rien de la puissance des prières d’une mère chrétienne sur le cœur de Dieu. Au mois d’octobre de la même année, Gaston entrait au Grand Séminaire de Montréal, conscient du rôle providentiel que les sacrifices de sa bonne mère lui avaient dévolu.

N’ayant pas trouvé dans son aîné les goûts qu’il se serait plu à y voir. Monsieur Giraldi avait tourné ailleurs ses regards. Actionnaire lui-même de la grande Compagnie américaine qui lui avait acheté son Brevet d’inventeur, il s’adressa à son Président, monsieur Holden, pour obtenir le collaborateur qu’il souhaitait.

Des liens d’amitié les avaient unis, depuis qu’ensemble, ils avaient collaboré au succès du « Moteur Giraldi ». Après lui avoir exposé longuement ses plans et son désir, le père de Gaston reçut la lettre suivante :

Cher Monsieur et Ami,

Enchanté de pouvoir vous être agréable, je crois avoir sous la main le personnage de vos rêves. Il a nom Hippolyte Paillard ; il est encore jeune, entre vingt-cinq et vingt-sept ans ; c’est comme vous le désirez, un fanatique de l’automobilisme. Son nom d’ailleurs doit vous être connu, car il a été le Champion des courses en Floride l’été dernier, et il vient de gagner la coupe DAVIS & COY dans le Tournoi de Chicago, il y a eu hier huit jours.

Il est assez instruit, d’une vie digne et consacrée au travail : c’est le self-man, par excellence. Parti de rien, il s’est formé, à force d’énergie et de ténacité. Orphelin de bonne heure, il est, je crois, originaire de l’Acadie, car avec un accent particulier, il maîtrise très bien les langues française et anglaise. Comme caractère, c’est un silencieux, un peu taciturne ; il semble fier, au premier abord, mais au fond, il me paraît excellent jeune homme.

Dites-moi s’il ferait votre affaire ; pour mon compte, je suis incapable de trouver mieux.

Quinze jours après le reçu de cette lettre, Hippolyte Paillard était devenu le Secrétaire de monsieur Giraldi.