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L’ÉCRIN DISPARU

craignit moins la vie, parce qu’il se reconnut supérieur à beaucoup de ceux qu’il avait étudiés en psychologue sagace.

Il sentit que sa vie allait prendre une orientation nouvelle ; les circonstances d’ailleurs, le servirent à souhait. Plusieurs fois, à l’occasion de procédures légales qu’avait nécessitées la mort de sa mère, Léo Giraldi avait remarqué dans l’étude du notaire, une jeune fille fort réservée et dont la distinction ne le cédait qu’à son habileté au maniement des affaires. La similitude d’âge, de position et d’aptitudes frappa le jeune homme qui garda dans sa mémoire l’image vivante, incarnant à ses yeux, l’idéal de ses rêves.

Depuis deux ans déjà le notaire était mort, et n’avait pas laissé de fortune personnelle. Sa veuve, Madame Robin, avait quelques biens, dont elle et sa fille Lucie subsistèrent durant ces deux années ; mais la gêne ne tarda pas à se faire sentir au foyer.

D’autre part, plus d’une fois, les deux femmes avaient été frappées du sérieux de ce jeune homme, qui sortait rarement, s’amusait peu, si différent en cela des jeunes gens de son âge, et dont le front méditatif, semblait combiner de vastes projets. Madame Robin sentait sans le dire, décliner ses forces. Souvent, elle s’effrayait du sort que l’avenir réserverait à sa fille, si elle la laissait aux prises avec les embûches de la vie ; et cette pensée, s’ajoutant à la langueur de sa santé chancelante, assombrissait ses derniers jours.

Instinctivement, elle avait songé, que ce jeune employé, dont elle appréciait la dignité et la réserve, serait pour sa tendre Lucie, le soutien qui lui conviendrait. Elle-même fit les premières avances, afin d’étudier à fond ce caractère qui ne se livrait pas. Bientôt, des relations s’établirent entre eux, et souvent le soir en des causeries qui lui devinrent de plus en plus chères, Léo Giraldi, délaissant sa froideur coutumière apparaissait aux deux femmes, tel qu’il était, avec sa droiture native, ses idées originales parfois, généreuses souvent et qu’il exposait avec une véhémence singulière.

Les liens de sympathie noués sous les yeux de la mère, parurent à celle-ci, aussi sincères que réciproques ; aussi, quand elle vit Léo Giraldi faire près d’elle la démarche espérée, elle répondit par l’affirmative, sans la moindre hésitation. Il fut convenu que le mariage aurait lieu le mardi de la deuxième semaine après Pâques et que Madame Robin demeurerait avec ses enfants.

Très pieuse, Lucie exigea que Léo se préparât chrétiennement à la réception de ce grand sacrement ; et, muni des autorisations voulues, ce fut l’aumônier de Notre-Dame de Pitié, qui