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L’ÉCRIN DISPARU

train de 2 heures, ayant brisé son bicycle la veille, le jeune homme devait être de retour par le train de six heures qui coïncidait avec l’heure du souper pour la famille. Fidèle à son horaire le convoi est en gare à six heures et cinq, mais Jean n’est pas là.

Attentes vaines toute la soirée, inquiétudes croissantes, inutiles informations chez un ami que Jean saluait souvent au passage ; coups de téléphone réitérés aux deux professeurs de musique et dont le second déclare que son élève l’a quitté à quatre heures et demie.

Enfin, n’y tenant plus, monsieur Giraldi, prend son automobile et par la route qu’a dû suive le jeune homme, accourt à Montréal, faire des recherches, prendre des informations, prévenir la Police. À un demi-mille de la station de Montréal-Ouest, une foule, massée aux abords de la voie ferrée, attire l’attention du père ; déjà une vague appréhension l’étreint ; il questionne, on lui apprend la lugubre découverte faite une demi-heure auparavant.

Envahi par un affreux pressentiment, il demande à voir la victime, et à peine ses yeux ont-ils reconnu son fils, qu’un cri rauque s’échappe de ses lèvres crispées et il tombe sans connaissance. Dix minutes après les soins qui lui furent prodigués immédiatement, le malheureux père reprit peu à peu l’usage de ses sens.

De la station du Pacifique, un coup de téléphone mande au Vicomte de se rendre au plus vite au lieu qui lui est signalé ; d’où redoublement d’émois et de sinistres augures dans tout le personnel de la résidence. Accompagné de Madeleine, l’âme angoissée, le Vicomte arrive bientôt en automobile, et tous deux reçoivent en plein cœur la terrible nouvelle qui a failli coûter la vie au père de la victime.

La première crise d’émotions terminée, le corps qu’accompagnaient le Coroner et le médecin-légiste, fut reconduit au Parc des Cyprès. Après les manifestations d’une stupéfiante douleur, diversement ressentie par les habitants de la résidence, la cause d’une mort si tragique fut la question qui vint spontanément s’offrir à tous les esprits, se placer d’instinct sur toutes les lèvres.

Tous les hôtes de monsieur Giraldi avaient pris une si grande part à la cruelle anxiété du Maître, leurs témoignages de sympathie étaient si spontanés, que leur douleur ne pouvait être feinte, et éloignait à tout jamais l’idée du crime par un membre ou un habitué de la résidence.

Le Coroner, persuadé que la mort avait été involontaire, voulait dès lors prononcer un verdict de mort accidentelle. Il