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il ne put rien obtenir et dut partir après s’être heurté à une fin de non-recevoir absolue. Dans son voyage de retour, il fut de nouveau fait prisonnier par les Hiong-nou et resta dans leur pays plus d’une année ; mais en 126 avant notre ère, le chen-yu Kiun-tch’en mourut ; son frère cadet, I-tché-sié, et son fils se disputèrent le pouvoir ; I-tché-sié finit par l’emporter et prit le titre de chen-yu ; Tchang K’ien profita de ces troubles pour s’évader ; il rentra en Chine avec sa femme turke et un seul de ses cent compagnons.

Si le but particulier que s’était proposé Tchang K’ien n’avait pas été atteint, son expédition eut cependant des résultats considérables en ouvrant aux Chinois tout un monde nouveau pour eux. Se-ma Ts’ien nous a conservé, en l’abrégeant peut-être, le texte même du rapport que l’ambassadeur présenta à son souverain ; on y trouve décrits d’une manière sommaire, mais précise, les états de Ta-yuan (Ferganah), des Ou-suen (vallée de l’Ili), de K’ang-kiu (au nord du Syr-daria), de Ngan-ts’ai (steppes des Kirghiz), des Ta Yue-tche (Sogdiane), de Ngan-si (Parthie), de Tiao-tche (Chaldée ?), de Ta-hia (Bactriane). Tchang K’ien avait noté si ces peuples étaient nomades ou sédentaires ; il indiquait quelles étaient leur population et leur force militaire. Incidemment il parlait des sources du Hoang-ho et il admettait à ce sujet une assez bizarre théorie qui fut longtemps acceptée des Chinois ; selon lui, les rivières de Khoten et de Kachgar qui se réunissent pour former la rivière Tarim, étaient les véritables sources du Hoang-ho ; les eaux du lac Lop-nor, dans lequel se déverse le Tarim, devaient couler sous terre vers le sud-est et reparaître au sud du Koukou-nor à l’endroit où naît en effet le Hoang-ho. Cette conception géographique très erronée révélait du moins aux Chinois toute une région, le Turkestan oriental, sur lequel ils n’avaient eu jusqu’alors que les plus vagues notions. Tchang K’ien fit encore une autre remarque qui devait avoir une grande portée ; lorsqu’il était dans le pays de Ta-hia, il y avait trouvé avec surprise des bambous et des toiles qui provenaient des provinces