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au suicide pour ne pas subir un supplice infamant. Nous ne savons pas la date exacte de la mort de Se-ma Ts’ien ; le seul moyen que nous ayons de la fixer par approximation, c’est de rechercher dans son ouvrage quels sont les derniers événements dont il fait mention ; mais cette investigation est sujette à caution pour deux raisons : en premier lieu les interpolations assez nombreuses qui se sont introduites dans le texte dés Mémoires historiques peuvent nous donner le change ; ainsi, de ce que le rhéteur Yang Hiong qui vivait de 53 avant J.-C. à 18 après J.-C. est cité à la fin du chapitre CVII, on ne peut évidemment conclure que Se-ma Ts’ien vécut jusqu’au commencement du Ie siècle de notre ère ; si le caractère apocryphe du passage est ici aisé à découvrir, il est d’autres cas qui sont moins faciles à surprendre et c’est pourquoi on ne peut arguer de telle ou telle phrase de l’oeuvre pour établir que Se-ma Ts’ien dut vivre jusqu’après telle ou telle date. Nous avons cependant un moyen de nous sortir jusqu’à un certain point d’incertitude : les Chinois ont la coutume de décerner aux empereurs un titre posthume ; si donc Se-ma Ts’ien a vécu plus longtemps que l’empereur Ou, il l’appellera par son titre posthume, c’est-à-dire « l’empereur Ou », tandis que, s’il est mort avant que ce titre posthume lui eût été décerné, soit avant l’an 86 avant J.-C., il l’appellera « le présent Fils du ciel ». Mais ici nous rencontrons la seconde difficulté ; c’est à savoir que les Mémoires historiques sont une oeuvre trop considérable pour avoir été composée tout entière à la même époque ; ainsi, à la fin du Traité sur les sacrifices fong et chan, Se-ma Ts’ien nous donne une indication d’où il résulte qu’il écrit en l’an 99 avant notre ère XLIV-1 ; or plusieurs parties de son travail sont bien postérieures à cette date ; c’est pourquoi, tandis que dans certains chapitres des Mémoires historiques l’empereur est appelé « le présent Fils du ciel », il est admissible que dans d’autres passages il reçoive


XLIV-1. Cf. ma traduction du Traité sur les sacrifices fong et chan , Péking, 1890, p. 93, note 1. La date de 98 est erronée.