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King, son père et son prédécesseur, que Se-ma Ts’ien aurait d’abord encouru la colère du souverain ; son attitude lors de l’affaire de Li Ling l’aurait définitivement perdu ; il subit alors la mutilation ; puis, ayant exhalé son ressentiment en plaintes trop vives, il aurait été mis à mort.

Rien ne nous autorise cependant à regarder comme vrai ce récit tragique. D’après une version beaucoup plus plausible, Se-ma Ts’ien aurait au contraire fini par occuper à la cour la charge fort élevée de tchong chou ling XLI-1. « Après qu’il eut subi son châtiment, dit le Livre des Han antérieurs XLI-é, Se-ma Ts’ien fut tchong chou ling ; il se fit honorer et apprécier dans l’exercice de cette charge. » Ma Toan-lin XLI-3 nous fournit le même témoignage : « L’empereur Ou, écrit-il, fut le premier à se servir d’un eunuque pour veiller aux papiers d’état ; ce fut Se-ma Ts’ien qui en eut la charge. » Le tchong chou ling avait la haute surveillance de tous les rapports au trône et de tous les décrets impériaux ; il jouait le rôle qui était dévolu à certains membres du conseil privé (nei ko) sous la présente dynastie XLI-4. En outre, le fait que Se-ma Ts’ien ne fut pas mis à mort par l’empereur Ou nous est attesté par l’anecdocte suivante que nous trouvons dans le Livre des Han postérieurs : en 192 de notre ère, le sage Ts’ai Yong fut condamné à mort pour avoir voulu rester fidèle à l’usurpateur Tong Tchouo ; on intercéda pour lui auprès du ministre de la justice Wang Yun, en demandant qu’il pût achever l’histoire des Han qu’il avait commencé d’écrire. Wang Yun s’y refusa, disant : « Autrefois l’empereur Ou, en ne mettant pas à mort Se-ma Ts’ien, fit qu’il composa un livre diffamatoire qui fut transmis à la postérité XLI-5; » de


XLI-1. 中晝令 .

XLI-2. Ts’ien Han chou, chap. Lxit, p. 9 r°.

XLI-3. Wen hien t’ong k’ao, chap. LI, p. 1 r°.

XLI-4. Mayers, The Chinese government, n° 147.

XLI-5. Heou Han chou, chap. LX, 2e partie, p. 14 v° :昔武帝不殺司馬遷使作使作謗書流於後世.