Page:Sima qian chavannes memoires historiques v1.djvu/492

Cette page n’a pas encore été corrigée

des orgies et à des cruautés de plus en plus grandes : il avait tué le fils de roi Pi-kan ; il avait emprisonné le vicomte de Ki. Le grand précepteur, Ts’e, et le second précepteur, Kiang, prirent leurs instruments de musique et s’enfuirent auprès de (Ou, prince de) Tcheou. Alors le roi Ou fit une proclamation à tous les seigneurs en ces termes : « Yn a accumulé crime sur crime. Il m’est impossible, si je ne le punis pas définitivement, d’obéir au roi Wen. »

Il se mit donc à la tête de ses chars de guerre qui comptaient trois cents quadriges, de trois mille guerriers ardents comme des tigres et de quarante-cinq mille soldats armés de cuirasses pour aller dans l’est punir Tcheou. La onzième année, au douzième mois, au jour ou ou[1], les soldats franchirent tous le gué de Mong. L’assemblée entière des seigneurs disait :

— Courage ! courage[2] ! N’ayons aucune mollesse !

Le roi Ou fit alors la grande harangue[3] et s’adressa à la foule en ces termes :

— Voici, le roi (de la dynastie) Yn, Tcheou, obéit aux paroles de

  1. Le jour ou ou est aussi celui qui est indiqué dans le Chou king traditionnel, mais ces événements y sont rapportés à la treizième année et non à la onzième, comme cela résulterait de Se-ma Ts’ien.
  2. Le caractère [] est ici l’équivalent du caractère [] = s’appliquer avec ardeur. C’est cette dernière leçon que donne Wang Koang-lou. Pour cet emploi du mot tse, cf. Mencius, VII, a, 25 ; trad. Legge, p. 340.
  3. Kiang Cheng (H. T. K. K., ch. CCCXCIV, p. 7 v°) remarque que Se-ma Ts’ien donne expressément ce qui suit comme étant la grande harangue et qu’en outre P’ei Yn explique ce texte au moyen des commentaires de Ma Yong (79-166 ap. J.-C.) et de Tcheng Hiuen (127-200 ap. J.-C.), ce qui prouve que, sous les Han, c’était bien là ce qu’on regardait comme la grande harangue ; quoique le Chou king traditionnel présente en son lieu et place une rédaction entièrement différente.