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respectez pas mes ordres ; si vous, cochers, ne dirigez pas bien vos chevaux, ce sera que vous ne ╓165 respectez pas mes ordres ;

« Ceux qui observeront mes ordres, je les récompenserai devant l’ancêtre ;

« Ceux qui n’observeront pas mes ordres, je les mettrai a mort devant le dieu de la terre[1] ;

« Je vous ferai certes périr avec vos enfants[2].

  1. Lorsque le souverain allait faire une expédition guerrière, il emportait avec lui ses dieux ; les principales divinités de l’État étaient celles du temple ancestral à gauche et celles de la terre et des moissons à droite. Le souverain prenait donc les tablettes représentant son ancêtre et le dieu de la terre. La tablette de l’ancêtre était placée dans un char spécial appelé le char du respect ; il est probable qne la tablette du dieu de la terre avait aussi un véhicule particulier. La présence de ces divinités donnait au prince un mystérieux prestige : les récompenses qu’il distribuait étaient comme conférées par l’ancêtre, génie tutélaire et bon ; les punitions qu’il infligeait semblaient édictées par le dieu de la terre, personnification de la sévère justice. — Sur la coutume d’emporter les tablettes des divinités dans le camp, cf. Li ki, chap. Tseng tse wen, trad. Legge, Sacred Books of the East, t. XXVII, p. 324; [trad. Couvreur] — Tso tchoan, 4e année du duc Ting, trad. Legge, p. 754, — et d’autres passages des Mémoires historiques que nous signalerons lorsqu’ils se présenteront. — Sur la tablette était inscrit seulement le nom du dieu ; mais, par suite du caractère idéographique de l’écriture chinoise, le nom même était en quelque manière la représentation figurée des qualités essentielles de la divinité et jouait ainsi le rôle d’une véritable idole.
  2. La harangue se termine par trois vers dont les rimes sont au chang cheng de la cinquième catégorie (H. T. K. K., ch. DCLX, p. 7 r°). Il semble bien que nous ayons là sous sa forme concise et énergique une vieille imprécation rituelle où respire encore la sauvagerie des premiers temps de la civilisation chinoise. La harangue de Kan me paraît, malgré sa brièveté, un des monuments les plus remarquables, et à coup sûr les plus authentiques, de la haute antiquité ; elle est singulièrement plus vivante que les Règles de Yao et de Choen ou que le Tribut de Yu. — Cette harangue se trouve reproduite avec quelques variantes par Mo-tse qui l’intitule la Harangue de Yu et l’attribue à Yu et non à K’i.