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Yu loua ce discours en saluant et dit :

— C’est vrai.

Kao-yao dit :

— Oh ! l’essentiel est qu’il se connaisse en hommes, l’essentiel est qu’il donne le calme au peuple.

Yu dit :

— Hé ! qu’il en soit absolument ainsi, c’est ce que l’empereur lui-même a trouvé difficile[1]. Quand (le souverain) se connaît en hommes, alors il est prudent et sait nommer aux charges les hommes (qu’il faut) ; quand il sait donner le calme au peuple, alors il est bon et le peuple aux cheveux noirs l’aime. Quand, il sait être bon, quand il sait être prudent, comment serait-il inquiété par Hoan-teou, comment serait-il troublé[2] par (San) miao, comment serait-il effrayé par l’homme trompeur aux paroles artificieuses et à l’extérieur agréable[3] ?

Kao-yao dit :

— Oui. Hé ! si, d’une part il y a
  1. L’empereur dont il est ici question doit être l’empereur Yao qui, malgré sa vertu, n’avait pas été capable de nommer aux charges publiques les huit fils excellents de Kao-yang et les huit fils excellents de Kao-sin (cf. p.╓ 77 ) et qui attendit Choen pour exiler les quatre grands criminels. — Kiang Cheng (H. T. K. K., ch. CCCXCII, p. 3 v°) condamne cependant cette interprétation en disant que, Yao étant mort, un sujet comme Yu ne pouvait se permettre de critiquer sa conduite ; d’après Kiang Cheng, l’empereur est ici Choen ; Yu fait son éloge en disant que, quoique exerçant fort bien le gouvernement, il trouve sa tâche difficile et par conséquent il donne ses plus grands soins à l’accomplir.
  2. Quoique ni les commentateurs chinois ni M. Legge n’appellent l’attention sur le mot ts’iēn, ce mot me paraît assez difficile à traduire. Il est impossible de le rendre par « exiler » car c’est le souverain et non San-miao qui éprouve l’action exprimée par ce verbe, comme le montrent les phrases symétriques qui précèdent et suivent celle-ci. Je traduis donc le mot ts’ien comme signifiant « faire passer d’un État à un autre (au moral), émouvoir, troubler » ; mais je dois reconnaître que je n’ai jamais trouvé ce mot employé avec ce sens dans aucun autre texte.
  3. Hoan-teou et San-miao sont deux des quatre grands criminels (cf. p. ╓67-68 ) ; aussi les commentateurs chinois supposent-ils que l’homme trompeur n’est autre que Kong-kong ; Yu passe sous silence le quatrième criminel, Koen, parce que c’est son propre père.