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représentent volontiers leur pays comme ayant été de tout temps l'immense empire qu'il est devenu au cours des siècles ; à leurs yeux il y eut un moment d'affaiblissement et de désagrégation à la fin des Tcheou, mais les Han, en rétablissant le gouvernement central, ne firent que revenir à l'état de choses qui existait sous les cinq empereurs et les deux premières dynasties. Telle n'a point dû être la réalité. Ne tenons pas compte des cinq empereurs, symboles trop manifestes des cinq éléments pour être autre chose qu'une transposition historique d'un système philosophique. Après eux, c'est-à-dire à l'aurore de la clarté scientifique, nous voyons un petit état conserver religieusement les enseignements de ses rois qui jouent le rôle d'éducateurs des peuples : le roi est tout ; les autres hommes ne sont quelque chose que dans la mesure où ils l'approchent ; c'est pourquoi le Chou king ne nous parle guère que des Fils du ciel ou de leurs conseillers. Puis cette nation,supérieure à ses voisines par ses qualités intellectuelles, triomphe d'elles ; les princes subjugués se reconnaissent vassaux de leur vainqueur ; ils adoptent sa civilisation et croient faire un honneur posthume à leurs ancêtres en les rattachant par des généalogies artificielles à la famille du suzerain. Ainsi se forme le régime politique de l'époque des Tcheou qui n'est une féodalité qu'en partie ; s'il est vrai en effet que les ducs de Lou et de Yen, par exemple, étaient des parents du souverain et avaient été investis de véritables fiefs, la plupart des seigneurs cependant, et des plus puissants,descendaient de chefs autochtones ; leur situation était celle qu'avaient récemment encore les rois de l'Annam qui se prétendaient issus d'un des premiers empereurs chinois, Chen-nong, et rendaient certains hommages prescrits par les rites à la cour de Péking ; comme les empereurs actuels se sont dits les maîtres de l'Annam. ou de la Corée, ainsi les Tcheou, sur une échelle plus restreinte,pouvaient se targuer de commander aux princes de Tch'ou, de Ou, de Yue ou de Tchao. Bon nombre de ces prétendus feudataires n'étaient que des tributaires. Cependant la fiction qui les rattachait à