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des invocations au Ciel, on trouve presque toujours des prières adressées aux divinités des fleuves et des montagnes ; mais le Ciel parait avoir été de bonne heure considéré comme un terme simple, exempt de multiplicité et peut-être la cause en est-elle dans l’uniformité de la voûte azurée ; c’est là ce qui a permis à quelques sinologues de dire que les anciens Chinois étaient monothéistes, en abusant de ce terme pour l’appliquer à une conception religieuse rudimentaire que nous retrouvons chez plusieurs peuples barbares ; si le culte des ancêtres avait pu introduire dans cette unité primitive quelque diversité et si l’on reconnaissait cinq empereurs d’en haut correspondant aux quatre points cardinaux et au centre, le Ciel n’en était pas moins dans son ensemble une puissance unique qu’on appelait d’un seul nom. Les divinités terrestres au contraire étaient restées bien nettement distinguées entre elles suivant le canton auquel chacune d’elles présidait. L’empereur Ou fit donc un coup d’état quand, profitant de ce qu’une de ces divinités s’appelait la souveraine Terre, il l’éleva au-dessus de toutes les autres et en fit le symbole de la Terre en général. Par une mesure analogue, l’empereur Ou créa une hiérarchie entre les dieux du Ciel et il plaça au-dessus des cinq empereurs d’en haut une divinité suprême appelée T’ai-i, la grande Unité : cette création de la réflexion abstraite devait jouer aux siècles suivants un certain rôle dans les systèmes des philosophes.

Enfin, il y a lieu de reconnaître une relation étroite entre la religion et l’institution du Bureau de la musique, que l’empereur Ou fonda en l’an 120 avant J.-C. Parmi ceux qui en firent partie, il faut citer le poète Se-ma Siang-jou XCVII-1 et le courtisan Li Yen-nien. Le


XCVII-1. Mayers (Manual, n° 658), dit que Se-ma Siang-jou mourut en 126 avant J.-C. Mais c’est une erreur car le T’ong bien tsi lan (3e année Yuen-cheou) dit que Se-ma Siang-jou fut chargé par l’empereur de composer des chants pour le Bureau de la musique fondé en l’an 120. D’autre part, le chapitre des Mémoires historiques (chap. CXVII) consacré à ce poêle nous apprit qu’il mourut cinq ans avant le