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beaucoup d’apologues, a été copiée par les traducteurs postérieurs. En voici le canevas d’une manière très-abrégée.

Un souverain de la Chine, nommé Homayoun-fal همايون فال, c’est-à-dire, d’heureux augure, se reposoit, après une partie de chasse, avec son premier ministre Khodjestèh-raï, c’est-à-dire, d’un esprit béni, au bord d’une eau fraîche, ombragée de toute part, et dont la situation délicieuse lui fit bientôt oublier toutes ses fatigues. Au milieu des merveilles de la nature qui s’offroient à lui de tout côté et fournissoient mille objets à son admiration, et à son vizir autant d’occasions de réflexions utiles et de sages avis, des essaims d’abeilles qui occupoient le tronc d’un vieil arbre fixèrent l’attention du prince. Le vizir lui fit connoître l’industrie de ce peuple laborieux et le régime de sa république. L’ordre admirable de son gouvernement, comparé avec les troubles que les passions et la diversité des intérêts suscitent dans la société humaine, suggérèrent au roi cette réflexion : que le parti le plus sage étoit d’abandonner le monde, et de passer ses jours dans la retraite. Le vizir combattit cette résolution : il représenta au prince que dieu ayant voulu que l’homme vécût en société, ce seroit s’opposer à ses desseins que de vivre loin de ses semblables, et que, pour remédier aux maux que les passions et les intérêts individuels pouvoient faire à la société, dieu avoit établi le gouvernement et les droits de l’autorité. Ceci amena tout naturellement des considérations sur les devoirs des souverains, et le vizir proposa, pour modèle d’un prince accompli, Dabschélim, roi de l’Inde, qui avoit acquis la gloire la plus solide et la plus durable, en se conduisant d’après les avis du sage Bidpai.

Depuis long-temps Homayoun-fal desiroit connoître l’histoire de Dabschélim et de Bidpai, dont il avoit entendu parier ; il saisit cette occasion pour se la faire raconter par Khodjestèh-raï. Le vizir obéit et raconta l’histoire suivante :

Dabschélim avoit rendu son empire heureux et florissant par la sagesse de son administration. Parvenu au comble du bonheur, il employoit son repos à donner des fêtes, auxquelles il attirait un grand nombre de sages et de savans, pour profiter de leurs