Page:Silvestre - Le Conte de l’Archer, 1883.djvu/41

Cette page a été validée par deux contributeurs.
21
Le Conte de l’Archer.

contre les enchanteresses visions de femmes toutes nues, à cette différence près que, vous, vous ne luttez pas.

— Mieux vaut ressembler à saint Antoine lui-même qu’à son camarade, grommelait Mathieu Clignebourde entre ses dents.

— C’est pour vous mettre d’accord tous deux, concluait le tanneur, que j’entends vouer Tristan au noble métier des armes. Un bon archer échappe au double écueil de la gourmandise monacale et de l’incontinence bourgeoise. Toujours en guerre, s’il vit sous un bon roi comme le nôtre, il n’a le loisir de se donner ni à la bonne chère, ni à la volupté. Il mange ce qu’il peut en campagne, après l’avoir honnêtement ravi aux paysans, et s’il s’éprend de quelque femme, ce n’est jamais que de celle d’autrui, ce qui dure moins longtemps et est d’ailleurs infiniment plus agréable.

— Une fois de plus, merci ! murmurait dame Mathurine à moitié endormie sur ses fuseaux.

— Il n’y a vraiment de quoi, ma mie, poursuivait Guillaume ; si vous n’étiez plus ignorante que les carpes de l’étang de Plessis, lesquelles n’ont jamais été en Sorbonne, vous sauriez que tous les grands hommes de l’antiquité se sont formés à