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Le Conte de l’Archer.

en faisant claquer sa langue que la soif avait faite sèche comme un morceau de bois.

— Il vient de mes vignes et nous le foulons nous-mêmes en famille. Et vous me disiez que Sa Majesté très glorieuse était fort satisfaite du jeune archer que je lui avais envoyé ?

— Baillez-moi un peu de gigot, je vous en prie, car je me sens si fort affaibli par le jeûne que je ne pourrais parler si je ne reprenais quelque force.

— C’est différent, et vous en pouvez d’ailleurs manger sans inconvénient ; vous n’en sauriez trouver autre part de semblable. Ce sont de petits moutons qui paissent dans mes prairies et que nous tuons nous-mêmes quand ils sont suffisamment gras. Ainsi mon fils est capitaine, et quand le Roi parade dans sa bonne ville, c’est lui qui le précède, vêtu de brocart d’or et à la tête d’une compagnie d’arbalétriers ?

— Une nouvelle tranche achèverait de me mettre en état de vous répondre, et vous me la pouvez donner plus épaisse, s’il vous convient.

— À votre aise ! je n’entends rien refuser à un homme qui s’est fait si bravement mettre en capilotade. Vous plaît-il y ajouter quelques cornichons ? c’est ici le pays ; ma femme Mathurine les confit elle-même. Savez-vous, camarade, que je