Page:Signac - D’Eugène Delacroix au néo-impressionnisme, 1911.djvu/46

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
34
DE DELACROIX AU NÉO-IMPRESSIONNISME

d’un lustre papillotant qui la vivifie. Bien vite, il a surpris les secrets et les règles de la tradition orientale. Cette connaissance lui permettra de risquer plus tard les plus audacieux assemblages de teintes, les contrastes les plus opposés, tout en restant harmonieux et doux. Et depuis, dans son œuvre, on retrouvera toujours un peu de cet Orient flamboyant, sonore et mélodieux. Ses impérissables impressions du Maroc fourniront à son chromatisme si varié les accords les plus tendres et les plus fulgurants contrastes.

Charles Baudelaire, en sa critique impeccable, n’a point manqué de signaler l’influence que le voyage au Maroc eut sur la couleur de Delacroix :

« Observez que la couleur générale des tableaux de Delacroix participe aussi de la couleur propre aux paysages et intérieurs orientaux.

Ch. Baudelaire. {Art Romantique.)

De retour en France, averti des travaux de Bourgeois et de Chevreul, il constate que les préceptes de la tradition orientale sont en parfait accord avec la science moderne. Et, lorsqu’il va au Louvre étudier Véronèse, il s’aperçoit que le maître vénitien dont il dit : « Tout ce que je sais, je le tiens de lui », avait aussi été initié aux secrets et aux magies de la couleur orientale, probablement par les Asiatiques et les Africains qui, de son temps, apportaient à Venise les richesses de leur art et de leur industrie.