Page:Signac - D’Eugène Delacroix au néo-impressionnisme, 1911.djvu/26

Cette page a été validée par deux contributeurs.
14
DE DELACROIX AU NÉO-IMPRESSIONNISME

S’il connaît les lois d’harmonie, qu’il ne craigne jamais de dépasser la mesure. Delacroix l’incite à colorer à outrance, le lui ordonne même :

« Il faut que la demi-teinte, c’est-à-dire tous les tons, soit outrée. »

« Il faut que tous les tons soient outrés. Rubens outré. Titien de même. Véronèse quelquefois gris, parce qu’il cherche trop la vérité… »

9. Ce moyen d’expression, le mélange optique de petites touches colorées, posées méthodiquement les unes à côté des autres, ne permet guère l’adresse ni la virtuosité ; la main aura bien peu d’importance ; seuls le cerveau et l’œil du peintre auront un rôle à jouer. En ne se laissant pas tenter par les charmes du coup de pinceau, en choisissant une facture non brillante, mais consciencieuse et précise, les néo-impressionnistes ont tenu compte de cette objurgation d’Eugène Delacroix :

« La grande affaire, c’est d’éviter cette infernale commodité de la brosse. »

« Les jeunes gens ne sont entichés que de l’adresse de la main. Il n’y a peut-être pas de plus grand empêchement à toute espèce de véritable progrès que cette manie universelle à laquelle nous avons tout sacrifié. »

Puis Delacroix revient encore sur les dangers d’une exécution trop facile :

« Le beau pinceau libre et fier de Van Loo ne mène qu’à des à-peu près : le style ne peut résulter que d’une grande recherche. »

Afin de défendre ces petites touches offusquantes à