il est vrai, en parler à Sélim, mais je craignais son caractère, je savais bien qu’à la première minute il prendrait à cœur mes paroles ; mais qui pouvait être sûr que le lendemain il ne se moquerait pas de moi, avec son cynisme particulier ? que ses paroles inconsidérées ne terniraient pas l’idéal, auquel dans mes rêveries je ne pensais pas sans un trouble respectueux ?
Mon caractère d’ailleurs était dissimulé et de plus, une grande différence existait entre Sélim et moi : j’étais sentimental, tandis que Sélim ne l’était pas pour un sou. Mon amour ne pouvait être que triste ; chez Sélim, il eût été joyeux. Je cachai donc mon amour à tous, je me trompai moi-même, et effectivement nul ne le remarqua. En quelques jours, sans en avoir jamais eu d’exemple, j’appris instinctivement à exécuter toutes les manifestations de l’amour : rêverie, rougeur dont se couvrait mon visage, lorsque quelqu’un prononçait devant