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Peu de jours s’étaient écoulés depuis que la jeune fille s’était endormie sur ma poitrine, et maintenant à cette seule pensée, mes cheveux se dressaient sur ma tête. Il y avait quatre jours seulement, en lui disant bonjour ou bonsoir, j’embrassais comme un frère ses lèvres pâles ; mais à présent le contact seul de sa main me brûlait d’un feu ardent. Je me mettais à l’adorer, comme on adore habituellement l’objet de son premier amour, et quand la jeune fille, sans rien savoir ni deviner, se serrait comme jadis contre moi, dans le fond de mon âme je me fâchais contre elle ; je croyais commettre un sacrilège.

L’amour m’apporta un bonheur insoupçonné jusque-là, mais aussi des souffrances également inconnues. Si j’avais pu confier mes soucis à quelqu’un, m’épancher et pleurer sur quelque cœur ami (et j’en avais un désir fou), il me semblait que la moitié du fardeau eût glissé de mon âme. J’aurais pu,