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La tristesse régna chez nous durant les deux jours qui précédèrent le départ de Hania. Madame d’Ives était déjà partie avec mes sœurs, et nous restions seuls, mon père, le prêtre, Hania et moi. La malheureuse savait qu’il lui fallait nous quitter, et ce départ la désespérait ; elle tâchait visiblement de me demander protection, mais je le remarquai et m’arrangeai pour ne pas me trouver seul avec elle. Je me connaissais, je savais que ses larmes feraient de moi ce qui lui plairait, et que je n’oserais rien lui refuser. Je fuyais donc son regard, car je ne pouvais supporter de sang-froid la prière suppliante de ses yeux, quand elle nous regardait, mon père ou moi.

D’ailleurs, il eût été bien inutile d’intercéder pour elle, car mon père ne revenait jamais sur ses décisions. Et puis une certaine honte m’éloignait de Hania, je rougissais de ma dernière conversation avec Mirza, de ma brutalité, de ce rôle enfin que je jouais, et surtout de ce que, sans