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sautai dans un petit canot à une place, et voguai sur l’étang, mais en suivant les roseaux de façon à voir sans être vu.

J’aperçus bientôt ceux que je cherchais. Dans un large espace, dégarni de roseaux, l’embarcation, dont les rames étaient relevées, se tenait immobile. À un bout étaient assis Sélim et Hania, et à l’autre, leur tournant le dos, ma petite sœur Éva. Celle-ci penchée sur l’eau, la faisait clapoter avec ses mains, en riant ; Sélim et Hania étaient presque épaule contre épaule, et parlaient avec vivacité. Nul souffle de vent ne venait rider la surface de l’eau, et le canot, Sélim, Hania et Éva s’y réfléchissaient comme dans un immense miroir.

Peut-être ce tableau était-il superbe, mais à sa vue j’eus la sensation que tout mon sang me montait à la tête. Je compris tout : ils avaient emmené Éva avec eux parce que la fillette ne pouvait les gêner ni comprendre leurs déclarations amoureuses, et qu’elle