Page:Siefert - Rayons perdus.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Nous n’avions rencontré personne sur la route
(Avec les animaux les gens dormaient sans doute),
Mais bravant la poussière où s’imprimaient nos pas,
Laissant notre voiture à l’abri du feuillage,
Nous vînmes au village,
Où les toits engourdis ne fumaient même pas.

Nous marchions assez vite & baissant les paupières,
Quand tout à coup surgit, derrière un tas de pierres,
Une pauvre idiote au geste menaçant,
Dont nous n’avions pas vu la tête effarouchée,
Car elle était couchée,
Et nous l’avions peut-être éveillée en passant.

Saisissant des cailloux, du fumier à poignées,
Pelotonnée en rond comme les araignées,
Elle nous regardait, & le frisson nous prit ;
En nous injuriant sa voix était terrible…
Oh ! le spectacle horrible
Que celui de la brute ayant vaincu l’esprit !

Nous passâmes portant, & l’idiote immonde
Retourna se tapir dans une auge profonde
En disputant sa place aux pourceaux endormis.