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Sentant mon cœur mourir & l’appeler tout bas,
Je répète : « À quoi bon, Il ne me verra pas ! »
Je pouvais autrefois, avant de le connaître,
Au temps où je rêvais en me disant : « Peut-être ! »
Je pouvais écouter votre frivolité,
Placer dans mes cheveux les roses de l’été,
Nouer un ruban bleu sur une robe blanche,
Et, comme un arbrisseau qui sur l’onde se penche,
Contempler mollement mes quinze ans ingénus.
(Songes, songes charmants, qu’êtes-vous devenus ?)
Je le cherchais alors & j’attendais la vie.
Mais aujourd’hui, comme me feriez-vous envie ?
Le soleil n’a pour moi ni chaleur, ni clarté.
Tout venait de lui seul dans ce temps enchanté,
L’amour comme l’espoir, l’air comme la lumière…
J’ai perdu, j’ai perdu mon aurore première ;
Celle qui rit pour rire & chante pour chanter,
Un souffle d’épouvante est venu l’emporter.
Tout est noir, tout est mort & je me sens glacée.
Oh ! ne m’arrachez plus à ma sombre pensée,
Rien sur ce flot amer ne peut me retenir,
Et l’ombre du passé s’étend sur l’avenir !


Septembre 18…