pauvre garçon. Les plaisanteries un peu tirées de son valet Trip ne nous plaisent pas davantage. Enfin on remarquera, comme nous, des passages superflus, des redites qui font longueur ou ventre, — selon le terme scénique, — et certaines facéties qui perdent tout leur sel à force d’être répétées. Mais il faut des ombres au tableau et, à part quelques petites imperfections, l’œuvre de Sheridan apparaîtra au lecteur français comme une des plus saines, des plus vivantes du théâtre moderne.
Faut-il parler maintenant de certaines critiques injustes ou exagérées, qu’on a cru devoir lui adresser sur quelques-uns de ses personnages ? La plus spécieuse est celle-ci : Charles nous est présenté sous un aspect si séduisant que nous oublions ses défauts, en somme blâmables, pour ne voir que ses qualités. De là à dire que Sheridan a revêtu de couleurs sombres la vertu dans Joseph et orné de fleurs le vice dans Charles, il n’y a qu’un pas pour les âmes charitables, en Angleterre comme en France.
Nous n’aurons pas de peine à faire justice d’un pareil reproche. Le jeune Charles Surface, coupable d’avoir gaspillé sa fortune, d’aimer le vin, le jeu et les femmes, mais au demeurant probe, obligeant, plein de cœur, convenant loyalement de tous ses torts, prêt à les effacer, les réparant déjà par son affection reconnaissante pour son oncle, par son amour pur pour Maria, semble bien terne, bien pâle, bien « godiche » auprès des aimables coquins de nos innombrables romans et pièces de théâtre, de ces Don Juans en habit noir, voire de ces Rocamboles, dont les femmes raffolent et dont les hommes envient les bonnes fortunes. C’est un modèle de délicatesse, de vertu et de continence, un phénix, un saint, auprès des fils de famille que Molière nous représente dupant sans scrupule des pères barbons, avec l’aide de leurs Scapin et de leurs Mascarille, et trompant sans