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ŒUVRES EN PROSE

Si vous êtes des esclaves, prosternez-vous devant ce bâton et léchez les pieds de vos oppresseurs ; pavanez-vous dans votre honte. Il vous sera naturel, si vous êtes des bêtes, d’agir conformément à votre essence.

Mais vous êtes des hommes.

Un homme véritable est libre, autant que les circonstances le lui permettent.

Alors opposez une ferme mais tranquille résistance. Quand on vous frappe sur une joue, tendez l’autre vers le lâche insulteur. Vous serez véritablement brave, vous résisterez et vous vaincrez. La discussion sur n’importe quel sujet est un droit que vous avez apporté dans le monde avec votre cœur et votre langue. Sacrifiez le sang de votre cœur plutôt que de renoncer à cet inestimable privilège de l’homme. Car il est naturel que les gouvernés s’enquièrent des actes du gouvernement, qui n’est d’aucune utilité s’il ne se dirige pas d’après le principe de la protection.

Vous avez bien des sujets de réflexion.

La guerre est-elle nécessaire à votre bonheur et à votre sécurité ? Les intérêts des pauvres n’ont rien à gagner à ce qu’une nation s’enrichisse ou qu’elle étende ses frontières ; ils ne gagnent rien à la gloire, mot qui a servi souvent de manteau à l’ambition ou à l’avidité des hommes d’État. Les victoires stériles que l’Espagne a remportées, au profit d’un gouvernement fanatique et tyrannique, ne sont rien pour eux. Les conquêtes que l’Angleterre a faites aux Indes, et qui lui ont sans doute acquis de la gloire, mais une gloire aussi peu ho-