Page:Shelley - Œuvres en prose, 1903, trad. Savine.djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
39
DE PERCY BYSSHE SHELLEY

pauvreté, sont le sort commun de la grande majorité du peuple, et alors qu’ils voient toujours grande sagesse et grande vertu chez les gens de condition moyenne. On dit que la pauvreté n’est pas un mal ; ceux qui parlent ainsi ne l’ont point ressentie, sans quoi ils penseraient différemment ; on dit que l’opulence est nécessaire pour encourager les arts, mais les arts ne sont-ils pas des choses bien inférieures à la vertu et au bonheur ? Il serait vraiment mort à tous les sentiments généreux, celui qui aimerait mieux voir de belles peintures et de belles statues qu’un million d’hommes libres et heureux.

On dira que j’ai le dessein de vous rendre mécontents de votre situation présente, et que je veux exciter une rébellion. Mais combien ils doivent être stupides et sots ceux qui croient que la violence et l’agitation d’esprit puissent favoriser en quoi que ce soit la cause de la paix, de l’harmonie et du bonheur. Ils devraient savoir que s’il est une chose bien faite pour produire la servitude, la tyrannie et le vice, c’est la violence dont on fait l’attribut des amis de la liberté, et, que les vrais amis de la liberté sont les seuls à répudier.

Quant au mécontentement que vous éprouvez de votre situation actuelle, tout ce que je pourrai dire n’ajoutera probablement rien à ce mécontentement. Je n’ai rien avancé, touchant votre situation, que ce qui est réel, que ce qui peut être prouvé. Je mets n’importe qui au défi d’indiquer une fausseté dans tout ce que j’ai dit en cet appel. Il est impossible que les plus aveugles d’entre vous ne voient pas que tout ne va pas bien.