Page:Shelley - Œuvres en prose, 1903, trad. Savine.djvu/52

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
35
DE PERCY BYSSHE SHELLEY

réaliser pendant notre vie, nous ne saurions espérer de voir aujourd’hui s’achever l’œuvre de la vertu et de la raison. Nous ne pouvons qu’en poser les fondations pour notre postérité.

Le gouvernement est un mal : c’est l’irréflexion et les vices des hommes qui en font un mal nécessaire. Quand tous les hommes seront bons et sages, le gouvernement tombera de lui-même. Aussi longtemps que les hommes continueront à se montrer sots et vicieux, il y aura un gouvernement, et un gouvernement, même comme celui de l’Angleterre, ne cessera d’être nécessaire pour empêcher les crimes des méchants.

La société est le résultat des besoins, le gouvernement celui de la malhonnêteté ; un état de juste et heureuse égalité sera celui du perfectionnement et de la raison de l’homme.

Il est vain d’espérer aucune liberté, aucun bonheur sans la raison et la vertu, car partout où la vertu est absente, le crime paraît et partout où paraît le crime, il faut un gouvernement. Avant que les entraves politiques ne se desserrent, il est tout juste que nous les rendions moins nécessaires. Avant de nous débarrasser du gouvernement, nous devons nous amender nous-mêmes. C’est cette tâche, que je voudrais vous recommander sérieusement.

Ô Irlandais, travaillez à votre propre réforme, et je ne vous le recommande point tout particulièrement parce que je crois que vous en avez le plus grand besoin, mais parce que, je crois, vous avez le cœur chaud, les sentiments élevés, et que vous